Enfourche ton lama, c’est parti pour la Bolivie

Après plus d’un mois passé en Argentine, avec ses hauts et ses bas, on attendait de découvrir ce pays que tout le monde considère comme un coup de cœur sud-américain. La Bolivie c’est une culture très riche et encore bien ancrée (le pays s’appelle officiellement « état plurinational de Bolivie ») et mais aussi des paysages diversifiés et très préservés. C’est assez logiquement qu’au moment de dessiner notre itinéraire et de choisir nos deux étapes sur ce continent que la Bolivie s’est imposée. Allez, on tourne la page sur tous nos petits tracas et on se réconcilie avec les latins!

Des lagunes quadricolores et du sel pas de Guérande

On retrouve nos premiers amours pour l’arrivée en Bolivie : bus de ligne puis passage à pied de la frontière (sans pot de vin!) avant de négocier un taxi collectif. Ça sent un peu l’Asie et ça nous plait. Le petit plus non négligeable c’est de pouvoir discuter avec nos compagnons de voyage (football en l’occurrence, les gens ne savent même plus qu’on est aussi bons en fromage et vin rouge).

Nous voilà dans notre première vraie petite ville bolivienne, Tupiza. Avant de devenir un point de départ pour les excursions du Sud Lipez, Tupiza était le centre économique de cette région agricole du pays. Par centre économique on ne veut pas dire que c’est le New York du sud du pays, non, c’est juste qu’il y a deux marchés, une gare de bus, quelques hôtels et restaurants, une petite place charmante et toujours des gens dans la rue. Et pour le coup, les boliviens sont totalement différents des argentins. Pas forcément souriants, un peu rustre même, on pourrait croire qu’on ne va pas rigoler ici. Pof, rien compris! On nous indique volontiers notre chemin, on discute avec nous, et on nous fait pas de courbettes, c’est vraiment agréable. Ben a même le droit à une petite moquerie de la part d’une mamie transportant son étale à travers les méandres du marché lorsqu’il lui propose son aide : « et le gringo là il veut m’aider, ahahah », avant de disparaître, elle et son chapeau haut de forme.


Si nous sommes ici c’est pour partir à la découverte de la région sud-est du pays, le Sud Lipez. C’est assez peu connu à l’étranger, mais tout bon touriste voyageant en Bolivie passe par cette région, et apparemment ça en jette. On embarque au petit matin avec deux  nouveaux compagnons de voyage, Annalena et Amir, à bord d’un 4×4 qui sera pour les quatre prochains jours notre meilleur ami (et celui de nos fesses surtout). Aux commandes, Cristobal, sept ans de pilotage dans la région et ayant pour passion la satisfaction du touriste. À ses côtés, Noémie, sa femme et cuisinière du voyage qui a un objectif : nous remplir le ventre dès qu’on coupe le moteur.

La première journée est surtout dédiée à faire de la route pour s’approcher du parc national que nous allons visiter. Nous prenons petit à petit de l’altitude au milieu des montagnes et canyons aux tons marron, gris, vert et ocre. C’est la continuité de ce que l’on a découvert dans le nord de l’Argentine, les poulets ne sont pas impressionnés outre mesure, mais le meilleur est à venir et nous le savons. On visite un village minier abandonné à 4690m d’altitude, la région est truffée de galerie menant à des filons, principalement d’argent et de cuivre, éteint ou encore exploités. Après huit heures de route, et avant d’arriver à notre auberge pour la nuit, nous découvrons notre première lagune, la Laguna Morejon, et quelques flamands roses. Une lagune est un plan d’eau douce se remplissant durant la saison des pluies et s’asséchant ensuite petit à petit au cours de l’année. Elles peuvent être de différentes couleurs (pouvant même varier au fil de la journée ou des saisons) en fonction de la composition chimique du sol (et donc de l’eau) ou des algues microscopiques y vivant. Audrey adore les échassiers aux plumes roses, se sentant apparemment partager une sorte d’élégance avec les volatiles. Nul doute qu’elle va se coucher avec le sourire aux lèvres dans le petit village lunaire qu’est Quetena Chico.

La deuxième journée est censée envoyer du pâté. On va entrer dans la réserve nationale Eduardo Avaroa, le parc du Sud Lipez. Comme tous les matins Cristobal nous présente le programme détaillé, chronométré, optimisé pour nos beaux yeux. Il n’a pas peur de se mouiller un peu et de nous en mettre en garde, va y avoir du décrochage de mâchoire en rafale. On ne va pas garder le suspens plus longtemps (et puis c’est compliqué dans un récit de ce type, on n’est pas sur du Stephen King), il ne nous a pas raconté de bobards! On enchaîne les lagunes avec la Laguna Hedionda Sur et la Laguna Kollpa, la seconde utilisée pour récolter du sel (non comestible), avant de traverser le désert dit « de Salvador Dali » en raison des dégradés de couleurs des montagnes l’encerclant. Les paysages sont magnifiques. On est pas loin de 5000m d’altitude et il fait un peu froid mais le soleil tape fort et nous réchauffe. Arrive enfin la première attraction majeure, la Laguna Blanca (vous devinez la couleur?) mais surtout le volcan Licancabur (5920m tout de même) se reflétant dans la Laguna Verde (celle-ci n’est verte que lorsque le soleil est à son zénith). Là c’est pas du paysage de rigolo, ça pète. Avant de reprendre la route vers le nord et après un déjeuner de rois, on profite des bienfaits de la géothermie locale et on barbote dans un petit bain à 35° au bord des lagunes, au milieu des flamands roses. On est bien mon tintin.

Quelques kilomètres plus loin nous découvrons une autre manifestation volcanique de la zone. Des bains bouillonnants gris et rouge écarlate laissent échapper des fumerolles soufrées. Interdiction de faire trempette, un touriste (prix Nobel de la prudence de toute évidence) a déjà laissé son assurance vie ici il n’y a pas si longtemps. Une pensée pour le bougre et nous voilà à l’arrière du 4×4 pour une petite sieste digestive (on vous a dit qu’elle nous gavait un peu Noémie…). Le dernier arrêt de la journée aura certainement des séquelles sur notre capacité à fermer la bouche à l’avenir. La Laguna Colorada. Inconnue des poulets jusque-là, cette lagune est un bijou. D’une couleur rouge rubis liée à sa concentration en algue, ce gigantesque plan d’eau est superbe. Des centaines de flamands roses se baladent sur son pourtour, des lamas broutent paisiblement sur sa berge, les montagnes en arrière-plan se reflètent à la perfection à sa surface. C’est un coup de cœur pour les poulets qui flânent et profitent de leur chance. Et puis Audrey essaie par tous les moyens de capturer un lama ou un flamand pour le ramener, c’en est un peu gênant et il faudra l’aide des forces de l’ordre pour la maîtriser (cette partie est un peu exagérée). Repus par toutes ces merveilles, les poulets trouvent un sommeil paisible au second camp de base, le petit village étape de Villa Mar.

Le programme du troisième jour est assez différent. On commence (après un énorme petit déj préparé par Noémie) par à aller admirer des formations de roche volcanique de zone appelée Italia Perdida (un touriste italien à vélo aurait perdu sa tente après être allé admirer les étoiles, ah les légendes millénaires<). Le principe est de laissée aller son imagination afin de voir apparaître des animaux, des arbres, des objets du quotidien. Ben n’est pas conquis, et bien qu’il soit un grand amateur de la même activité lorsque ça concerne des nuages, les gros cailloux, ça l’inspire pas. Bon, il y a bien ce gros stalactite qui met tout le monde d’accord, c’est la coupe du monde de football (celle qu’on a soulevé en juillet oui oui). Vient ensuite le moment redouté par Audrey depuis son réveil, les derniers flamands roses de l’excursion. La Laguna Vinto est donc l’occasion d’ajouter une nouvelle rafale de deux cents photos à la carte mémoire de l’appareil… Les larmes d’Audrey cessent de couler dès l’arrêt suivant (dit comme ça on dirait un voyage en métro mais imaginez à chaque fois 30 minutes de piste, au milieu d’un désert de steppes, entre 4500m et 5000m d’altitude. C’est pas la même chose qu’un voyage « Patte d’oie – Jean Jaurès » de nos amis toulousains). On arrive au cœur d’un petit canyon recouvert d’un tapis vert, où serpentent des ruisseaux, et où broutent quelques lamas. Ça tranche pas mal avec ce que l’on voyait jusqu’à maintenant. Au bout du canyon, nous découvrons une nouvelle lagune, la Laguna Negra (de couleur vert très foncé, à quoi pensiez-vous?), un petit plan d’eau avec des canards. C’est mignon et d’après notre guide, ça plait aux français. Le reste de la journée est dédiée à de la route pour nous approcher de notre hôtel pour la nuit. La journée suivante débutant tôt, il est prévu de nous reposer un peu avant d’aller nous coucher dans notre hôtel de sel sur le bord du Salar d’Uyuni. Oui oui, un  bâtiment dont les murs sont construits avec des briques de sel, les sommiers en briques de sel, les tables et les bancs en briques de sel et du gros sel recouvrant le sol (en sel lui aussi). C’est plutôt charmant et original, les poulets apprécient. En plus le sel isole bien et la nuit est vraiment plus douce que les précédentes.

Ça y est, on y est. Le jour du Salar. Levés comme les poules, les poulets prennent la route du cœur du Salar avant même les premières lueurs de l’aube. Il fait nuit noire et Cristobal conduit feux éteints sur cette immensité plane pendant quelques dizaines de kilomètres. Il se repère aux silhouettes des montagnes et volcans bordant le désert de sel au loin. Notre destination est une île au milieu du Salar : la Isla Inkahuasi. Habitée par les Incas, cette petite colline recouverte de cactus est légèrement aménagée afin que nous puissions la gravir et admirer le lever de soleil depuis le sommet. Le spectacle est magnifique. Nous découvrons un océan blanc prenant petit à petit des couleurs orangées et rosées. Pas de doutes, les poulets aiment les levers de soleil. Le Salar est impressionnant, on n’en voit pas la fin, et peu importe dans quelle direction on regarde. Nous enchaînons avec la traditionnelle séance photos trompe l’œil au milieu du désert blanc. Ce n’est pas si facile mais nos guides expérimentés nous aident à prendre quelques photos sympas. Avant de clore ces merveilleux quatre jours, nous passons par le monument honorant le Rally Dakar, l’amas de drapeaux où tout le monde vient ajouter le sien (devinez s’il y avait un drapeau breton) et le cimetière de trains. Voilà, c’était vraiment génial et nous ne nous attendions pas à tous ces paysages, surtout dans le Sud Lipez. Le Salar est connu mondialement, mais la région sud du pays est tout aussi impressionnante.

Le midi même nous reprenons la route pour nous rendre dans la capitale de Bolivie, Sucre. Un voyage de 3h en bus où Audrey manque de peu de se faire pipi dessus, suivi par un rally en taxi collectif de 2h30 dans les montagnes, on arrive sains et saufs (et secs).

Trois jours à Sucre, salé vaut vraiment

Nous découvrons Sucre à un rythme relativement tranquille. La ville semble s’étendre sur des collines à perte de vue mais nous nous cantonnons aux rues du centre, classées patrimoine mondial de l’UNESCO. Les façades des maisons sont d’un blanc immaculé au style colonial et cachent des patios colorés. De jolis cafés fleurissent partout, on en profite. Certains proposent des points de vue magnifiques sur les toits de la ville, depuis le toit d’une église par exemple. Nous sommes conquis par la capitale bolivienne qui nous offre cet arrêt citadin. Cela fait du bien de baisser notre garde et de pouvoir arpenter le marché et acheter un jus de fruit frais aux petites dames armées de leur mixeur. Ah non, il ne fallait pas la baisser cette garde, Audrey retrouve ses habitudes asiatiques et passe une journée cloîtrée dans son lit, on ne peut pas lui faire confiance à cet enfant!

Heureusement ce n’est qu’un mauvais jour et dès le lendemain nous avons le loisir de visiter le musée Asur sur les arts indigènes et l’art du tissage bolivien. Nous découvrons les traditions encore pratiquées aujourd’hui à l’occasion de fêtes annuelles, mais auxquelles nous ne pourrons pas assister malheureusement. Comme tous les pays en développement que nous avons visités, il y a une tendance à l’homogénéisation avec l’occident pour modèle. La Bolivie semble cependant bénéficier d’une plus grande considération de ses origines multi-ethniques par son gouvernement actuel (celui-ci devrait changer vers des objectifs plus économiques dès l’année prochaine…). Bien que Sucre ait des airs de petite ville bobo et qu’on y croise moins de petites dames chapeautées, un ballot sur le dos, ce musée est là pour nous rappeler qu’il y a encore des boliviens qui se battent pour conserver les savoirs indigènes. Le tissage aux motifs incroyables que l’on peut découvrir au musée Asur en est un exemple criant (c’est réellement incroyable et sans doutes les tissages les plus fins que nous avons vu de nos vies).


Il est maintenant temps de reprendre la route en direction de La Paz, l’autre capitale du pays (où siègent le gouvernement et la plupart des institutions). Et un bus de nuit un! Mais comparé à ceux qu’on prenait il y a 6 mois durant nos aventures asiatiques, celui-ci est plus confortable, nos fesses sont même les premières qu’il a le loisir de convoyer. Et oui, les poulets fatiguent comme des petits vieux alors si c’est pour faire 12 heures de bus, 3 euros supplémentaires de confort sont les bienvenus! On vous en dira plus sur cette capitale jonchée à 4000m d’altitude dans le prochain article des poulets, promis!

A bientôt,

Audrey & Ben

10 Replies to “Enfourche ton lama, c’est parti pour la Bolivie”

  1. Wow. Quel bel article. Ça donne trop envie d’aller visiter la Bolivie 🤩 et quelles belles couleurs sur les photos. Heureuse que ce pays vous a tellement fascinée. A très bientôt.

    1. Oui, gros coup de cœur encore surtout pour cette partie de la Bolivie ! C’était magique et coloré assurément ! Bolivie is wunderbar

  2. Mais comment faites-vous pour dénicher des coins pareils…??? C’est magnifique !
    sympa les photos en trompe l’oeil !
    Belles découvertes en tous cas. J’avais reçu une vidéo sur l’hôtel en sel… j’avais trouvé cela stupéfiant. De là à penser qu’un proche y séjournerait… c’est dingue !
    Je ne sais pas comment vous faites pour garder le rythme… !
    Bon séjour, profitez-en bien petits poulets…

    1. Haha. C’est vrai qu’on est chanceux de voir autant de belles choses ! Gros coup de cœur pour la Bolivie. Et du sel pour Ben le Guérandais quelle aubaine ! On avoue qu’on commence un peu à fatiguer… On se réjouis tout même de rentrer et vous revoir tous ! Mais avant un peu de plages mexicaines histoire d’en profiter encore ! Bisousss

  3. Magnifique les poulets! Toujours un plaisir de lire vos articles, et les lamas et les flamants roses ont fait exploser nos esprits! Mais où est l’aquarelle d’Audrey?!
    Plein de love de Loïc et Marion

    1. Merci ! Ces petites bêtes ont fait littéralement craquer Audrey ! L’aquarelle est en chemin, ou sinon on prendra une photo de ton aquarelle flamand rose c’est plus simple hihi ! Bisous à vous deux

  4. salut les amis,
    Très bel article ..encore et que dire des photos !!!
    cela donne envie d’aller voir tout ça de plus près
    A bientôt
    Bises à vous deux
    Maryse et Franck

    1. Hey hey!
      La Bolivie est certainement un des plus beaux pays que nous ayons visité. Les paysages sont fous. On a fait ce qu’on pouvait avec notre petit appareil photo gadget, on est rassuré si vous pouvez vous rendre compte un minimum de ce que c’était là-bas 🙂

  5. Je me joins à tous les commentaires précédents c’est super!
    Entre le Gringo et la fofolle des flamands roses et autre lamas, vos compagnons
    d’infortune doivent bien rigoler.Bisous.Moi.

    1. Malgré tout ce qui nous est arrivé en Argentine, on avait une patate du tonnerre en Bolivie, et ça a dut être communicatif, c’est certain! Même décrocher un sourire aux boliviens n’est pas chose aisé…

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